Parce qu'elle est à la fois chargée de les juger et de les protéger, la justice des mineurs est une des institutions symboles de l’universalisme républicain. Traite-t-elle pour autant tous ces justiciables de la même manière ?

Arthur Vuattoux a mené l'enquête auprès de deux tribunaux, suivi plusieurs procès, analysé plus de deux cents affaires mettant en cause des adolescents. Verdict : les normes de genre orientent profondément la façon dont les professionnels consultés par les juges et les juges eux-mêmes appréhendent les déviances à cet âge. Autant ils ramènent volontiers celles des garçons aux actes commis et au rôle des pairs, autant ils sont enclins à sexualiser et à médicaliser les comportements des filles.

Ce traitement différencié dépasse les questions de genre, il touche aussi la race, l’âge, la classe sociale. Il contribue à produire ou à renforcer, au cœur même de l’institution judiciaire, les discriminations systémiques envers des populations minoritaires.

Arthur Vuattoux est maître de conférences en sociologie à l'Université Sorbonne Paris Nord et membre de l'Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux. Sa thèse, dont cet ouvrage est le prolongement, a reçu le prix de la Ville de Paris pour les études de genre (2016) et le prix de thèse du Défenseur des droits (2017).

Sommaire

Introduction

I — L'ordre de genre au tribunal pour enfants

Chapitre 1 – Scènes de la vie judiciaire quotidienne 

• Un concours de danse qui tourne mal  
• Des garçons à l'intimité peu interrogée  
• Trois délinquants et une mère : chronique sociologique d’un procès aux assises

Chapitre 2 – Féminités et masculinités au tribunal pour enfants 

• Sexualisation et sanitarisation des adolescentes déviantes 
• Les garçons confrontés à la justice : masculinité et marginalisation

Chapitre 3 – Le genre comme grille de lecture ordinaire des situations des justiciables  

• La notion de grille de lecture genrée  
• Qualifier les différences de traitement. Justice personnalisée, biais de genre ou discrimination institutionnelle ?

II — Privilèges et oppressions de genre, race, classe et âge

Pour une lecture renouvelée du traitement judiciaire des adolescents

Chapitre 4 – Quatre jeunes filles « bien sous tous rapports ». Privilèges liés aux rapports de genre, race et classe dans une procédure de composition pénale  

• Un détail de taille : le choix de la composition pénale  
• Présentation de soi et conditions de vie des adolescentes : la marque de la classe et de la race  
• L’implication des parents, atout pour un traitement plus favorable  
• D’un cas singulier à l’idée d’une justice perméable aux rapports de pouvoir : ce que ces jeunes filles disent des privilèges au tribunal pour enfants

Chapitre 5 – Dans le quotidien du tribunal pour enfants : oppressions de genre, race, classe et âge  

• Déviances parentales et essentialisme dans le traitement judiciaire  
• Stigmates sociaux et lectures culturalistes des situations  
• La gêne institutionnelle face aux handicaps des jeunes  
• Corps conformes, corps déviants

Chapitre 6 – Le cas des « jeunes filles roumaines », révélateur des discriminations à l’œuvre dans l’espace judiciaire 

• Une discrimination inscrite dans l’histoire de l’Europe  
• Des discriminations globales aux discriminations locales : les jeunes Roms face à la justice  
• Le traitement judiciaire singulier des « jeunes filles roumaines »  
• Un double rejet des « jeunes filles roumaines » : hors de la féminité et hors de l’adolescence  

Conclusion

• Les apports d’une approche intersectionnelle des actes d’État  
• Universalisme juridique, inégalités et discriminations  
• Horizons critiques

 

Remerciements

Bibliographie

Table des documents

 

• Presses de Sciences Po, Paris, 4 février 2021, 192 pages. ISBN : 9782724626940. 20,00€http://www.pressesdesciencespo.fr/fr/book/?gcoi=27246100193420